La Ford T



La conception de la Ford T est due à Childe Harold Wills et
à deux immigrés hongrois, József Galamb et Jenő Farkas. Harry Love, C. J.
Smith, Gus Degner et Peter E. Martin furent aussi impliqués. La production
commença en 1908, mais les « années modèle » vont de 1909 à 1927. La première
Ford T de série sort de l'usine Piquette à Détroit le 27 septembre 1908.



La Ford T est surnommée « Tin Lizzie » ou « Flivver » aux
États-Unis.



Elle est généralement considérée comme la première voiture
accessible au plus grand nombre, celle qui « mit l'Amérique sur des roues ».



Henry Ford a beaucoup innové lors de la fabrication du
modèle T.



L'usine Ford de Piquette ne pouvait pas suivre la demande,
et seulement onze voitures furent construites durant le premier mois de
construction. En 1910, après avoir assemblé 120 000 « T », Henry Ford déplaça
la société vers le nouveau complexe de Highland Park. C’est ici que en 1913,
l’assemblage se fait à la chaîne, et non plus individuel et manuel (quoique
Oldsmobile ait introduit cette méthode plus tôt pour la Curved Dash), les
salaires passent à 5 dollars pour que 
les ouvriers, fournissent eux-mêmes un marché garanti. La « T » fut donc

la première voiture construite à la chaine avec des pièces complètement
interchangeables d'un exemplaire à l'autre. Son objectif était de séduire la
classe moyenne américaine.



La voiture fut initialement proposée à un prix de 850
dollars, alors que peu de modèles étaient disponibles à moins de 2 000. Vers la
fin des années 1920, le prix était tombé à 300 dollars en raison des économies
d'échelle et du perfectionnement de la chaine de production. Pour baisser le
coût de production, Henry Ford procéda à une concentration en interne de diverses
industries nécessaires à la production de ses voitures.



On attribue souvent à Ford la phrase « un client peut
demander cette voiture en n'importe quelle couleur, du moment que c'est noir. »
En réalité, des T de plusieurs couleurs ont été produites de 1908 à 1912, puis
à nouveau en 1926 et 1927. Contrairement à une autre légende, la couleur noire
n'a pas non plus été choisie en raison d'un temps de séchage plus court des
peintures, autorisant ainsi une cadence de production plus élevée. Elle aurait
simplement été choisie en raison de son prix moindre et sa durabilité. Plus de
30 types différents de peintures noires, présentant des temps de séchage
différents, étaient utilisés pour peindre les différents composants de la Ford
T, chacun choisi en fonction des exigences de la pièce en question et des
méthodes pouvant être utilisées pour la poser.



En 1914, la procédure d'assemblage de la « T » avait été
tellement améliorée qu'il ne fallait plus que 93 minutes pour en assembler un
exemplaire. Cette année-là, Ford produisit plus de voitures que tous les autres
constructeurs réunis. Lorsque la dix-millionième « T » fut produite, plus de la
moitié des voitures dans le monde entier étaient des Ford. Au final, plus de 15
millions furent produites, record de production pour un seul modèle qui ne fut
battu que par la Volkswagen Coccinelle qui dépassa les 21 millions. Certes, il
y eut 31 millions de Toyota Corolla et 25 millions de Volkswagen Golf, mais
dans les deux cas il s'agit en fait de la somme de plusieurs modèles successifs
dont les évolutions sont étalées sur plusieurs décennies. Le moteur de la Ford
T continua à être produit jusqu'au 4 août 1941. Près de 170 000 moteurs furent
produits après que la production de la voiture eut cessé, principalement pour
servir de remplacement dans des voitures existantes.



La « T » est une propulsion. Sa transmission par train
épicycloïdal comprend deux vitesses avant et une marche arrière. La conduite en
est assez particulière.



La transmission est contrôlée par trois pédales au sol, un
levier monté à la gauche du siège conducteur et deux leviers au volant à gauche
et à droite. L'accélérateur est un levier, à droite du volant. En enfonçant la
pédale de gauche, on enclenche le premier rapport dit « court ». En la
remontant, on passe en seconde, rapport « long ». En la ramenant en position
centrale, la voiture est au point mort, ce qui peut aussi s'obtenir en tirant
le levier de gauche. La voiture peut rouler à vitesse constante sans que le conducteur
n'appuie sur aucune pédale, l'accélérateur étant commandé à main droite. Il n'y
a pas d'embrayage, ce qui fait de la « T » l'ancêtre des véhicules à boîte
automatique.



La pédale centrale sert à partir en marche arrière et celle
de droite contrôle un frein sur la transmission. En tirant le levier de gauche,
on ramène d'abord la pédale de gauche au point mort, puis on freine sur les roues
arrière.



Bien que ce soit très rare, les freins à bande de
transmission peuvent se désaligner, surtout par temps froid, si bien que la
voiture « broute », ajoutant un risque à la mise en route : une personne
mettant en route le moteur peut être forcée à reculer en tenant encore la
manivelle si la voiture, pourtant au point mort, se met à avancer - un incident
immortalisé par certains films de Laurel et Hardy.



L'énergie du moteur atteint le différentiel par le biais
d'un cardan et d'un arbre qui actionne le train arrière, certains modèles ont une deuxième boite de vitesse (ruckstell)
à deux rapports, installée à l'arrière, actionnée par un levier. Les boîtes de
vitesses sont constituées d'acier au vanadium et baignent dans l'huile.



La suspension de la T utilise un ressort semi-elliptique
transversal pour chaque essieu. Elle repose sur le principe du pont moteur,
aujourd'hui abandonné au profit des roues indépendantes. L'essieu avant était
constitué d'une pièce coulée d'acier au vanadium. Des exemplaires de
démonstration ont été tordus huit fois sur eux-mêmes (en torsion) sans se
briser et ont été exposés chez les concessionnaires. La « T » ne dispose pas
d'un système de freinage comparable à ceux des voitures modernes. La pédale du
pied droit actionne une bande sur un tambour dans la transmission, qui freine
ainsi la roue arrière. Le levier de frein de parking mentionné plus haut tire des
mâchoires placées à l’intérieur des tambours de freins arrière.



Les roues sont en bois, d'une construction similaire aux
roues d'artillerie ; des roues à rayon d'acier furent disponibles uniquement en
1926 et 1927. Les pneumatiques sont d'un diamètre extérieur de 30 pouces (76
cm), avec une largeur de 3,5 pouces (8,9 cm) à l'arrière et 2 pouces (5 cm) à
l'avant. L'empattement est de 99 pouces, la largeur des voies normalement de 56
pouces, un train avant de 60 pouces était disponible sur commande « pour les
routes des États du Sud ».



Il y eut peu de changements importants pendant la durée de
vie de ce modèle ; les premières versions avaient un radiateur et des phares en
laiton. L'avertisseur et de nombreuses petites pièces étaient aussi en laiton.
Les phares étaient à l'origine des lampes à acétylène en cuivre qui furent
rapidement remplacées par des ampoules électriques.



Avant le modèle de 1912 sur lequel des portes avant furent
ajoutées à la version Touring, les voitures construites aux États-Unis
n'avaient pas de portes ouvrantes pour le conducteur.



Ford développa ses
propres camions pour le châssis de la « T », dénommés « Ford TT ». Le châssis
de camions était aisément accessible
afin de construire toutes sortes de bennes.



La Ford T utilisait certaines technologies avancées pour
l'époque, comme des aciers au vanadium. Sa durée de vie en est exceptionnelle.



Depuis la fondation de la société en 1903, Henry Ford avait
produit et mis au point plusieurs modèles de voitures. La première avait été
désignée modèle A, mais il n'y eut pas dix-neuf modèles produits jusqu'à la
Ford T : plusieurs n'étaient que des prototypes. La « T » succédait à la « S »,
qui elle-même dérivait du modèle le plus vendu jusque-là, la « N ». Après une
vingtaine d'années de production de Ford T, ce n'est pas un modèle « U » qui
lui succéda, mais une nouvelle type A qui devait par son nom exprimer le
renouveau de la gamme. La firme concurrente Chrysler en profita pour lancer en
1928 la première voiture de la marque Plymouth sous le nom de « Model U ».



La Ford T fut désignée voiture la plus importante du XXe siècle
au terme d'un sondage international.



 



Fiche technique :



Moteur : 4 cylindres verticaux, 4 temps, 20 ch, cylindres coulés d'un seul
bloc, avec chambres d'eau autour de la moitié supérieure du bloc. Fonte grise à
grains fins.



Soupapes latérales : Extra larges, toutes du côté gauche.



Vilebrequin et arbre à cames sont forgés et non coulés, en alliage
d’acier au vanadium .



Carter : Partie supérieure fixée au bloc-moteur. Partie
inférieure en acier embouti pour former le logement bas de la magnéto et de la
transmission.



Refroidissement par thermo siphon.



Allumage : Magnéto Ford, basse tension, composée d'une
couronne d'induits solidaires du bloc moteur et d'un rotor d'aimants permanents
sur le volant moteur.



Carburateur : Composé d'une cuve à niveau constant et d'un
tube de d'aspiration.



Transmission : Système épicycloïdal avec engrenages
satellites et planétaires Ford, baignant dans l'huile, en métal au vanadium. L’ensemble
est silencieux, comprenant une démultiplication (4/11), une prise directe, et une
marche arrière, faciles à passer.



Lubrification : Système combinant barbotage et gravité -
simple mais peu efficace sur les fortes déclivités.



Embrayage : À disques multiples métalliques, fonctionnant
dans l'huile.



Commandes : Marches avant par pédale de gauche. Marche
arrière par pédale du milieu. Accélérateur et avance à l'allumage sous le
volant de direction.



Transmission arrière : Par arbre à cardan et arbre de
poussé, avec joint universel unique vers le pont arrière. Ce système Ford à
trois points (breveté dans tous les pays) est en métal au vanadium.



Train avant : forgée, section en I, traitement spécial au
vanadium.



Direction : Réduction système Ford, irréversible placé derrière
le volant.



Freins : 2 types. Frein de service sur la transmission ; Freins de stationnement sur tambours de roues
arrière.



Roues : En bois type artillerie.



Pneus : pneumatiques ; arrière 30 x 3 pouces 1/2, avant 30 x
3 pouces.



Suspension : Avant et arrière, ressorts semi-elliptiques
transversal.



Réservoir : 10 gallons (47,30 litres). Réservoir d'essence
cylindrique monté directement sur le châssis.



Poids : 1 200 livres (544,32 kg).



Prix : 850 dollars, FOB (Franco On Board), Détroit,
Michigan.



Vitesse : 70 km/h



 



Quelques dates.



1908 : Début de la production.



1922 : la production dépasse le million annuel. Le 4
février, Henry Ford achète la société Lincoln.



1923 : Nouvelles carrosseries avec la Tudor et la Fordor.



1924 : le 15 juin sort la dix-millionième Ford T, la firme
s'installe au Mexique et au Japon puis l'année suivante en Australie.



1925 : Ford fabrique 44 % de la production automobile
américaine. Les pneus ballons arrivent tout comme le retour au choix de la
teinte de carrosserie. Le prix du Touring est au plus bas : 290 dollars (850 $
au lancement fin 1908).



1926 : Ford fabrique 36 % de la production automobile
américaine et propose désormais quatre teintes de carrosserie.



1927 : le 18 mai sort la 15 000 000e T et la production
cessera un peu plus tard pour laisser place à la Ford A.